Présidentielle J-26 : la campagne vue par Denis Robert
Le baron Von Starnberg n’appréciait pas les communistes. Au vu du cadre qui nous entourait, cela relevait pour le moins de l’évidence. Si j’avais vécu là, moi non plus, je n’aurais pas apprécié les communistes. Ce n’était pas que je les aimais, mais possédant moi-même fort peu de biens, j’avais avec eux plus de points communs que le baron, qui en possédait tant.
Philippe Kerr - La mort entre autres - 2006
L’autre jour, je me suis énervé en apprenant sur le journal d’Arte que l’Allemagne avait signé un accord avec la Suisse lui permettant de récupérer quelques milliards en contrepartie du maintien de l’anonymat des riches allemands ayant placé dans les banques suisses une partie de leur fortune pour échapper à l’impôt dans leur pays.
Aujourd’hui dans le Monde, je lis que cet accord faisait suite à un autre avec la Grande-Bretagne, et que l’Autriche vient d’en signer un encore moins intéressant pour ses finances publiques, en attendant que la Grèce en fasse de même.
Ces pays répondent à l’offre « Rubik » de la confédération helvétique obtenue par l’omnipotent lobby bancaire suisse, initiative de contre-offensive pour freiner une législation européenne plus contraignante contre la fraude et l’évasion fiscales par l’échange automatique d’information, qui risquerait selon les banques de conduire à une délocalisation vers d’autres paradis fiscaux au secret bancaire encore hermétique (Singapour, sultanat de Brunei, îles Caïmans...).
Pour un bénéfice aussi maigre que moralement contestable, chacun s’en va en ordre dispersé, dans son coin, avec plus ou moins d’atouts dans ses manches, signer sa petite convention, au détriment de tous.
Je sais que « un bon tiens vaut mieux que deux tu l’auras », mais je ne cesse de déplorer l’efficacité du « diviser pour mieux régner » de Machiavel, plutôt que l’adoption de « l’union fait la force ».
We want sex equality : confronté en mai 1968 à une grève des ouvrières réclamant l’égalité de salaire avec les hommes, du fait d'un soutien politique ferme, Ford fit en vain le chantage habituel à la délocalisation en cas d'alignement.
Pourquoi Diable, n’a-t-on pas une négociation conduite au niveau européen sur ce sujet ?
Le fait que les gouvernements européens ont toujours repoussé une harmonisation de la fiscalité de l’épargne et du capital et que, de manière plus générale la fiscalité a été maintenue comme un domaine réservé des États en application du très pratique principe de subsidiarité, ne sauraient aujourd’hui suffire à le justifier.
A fortiori, après avoir signé le traité de stabilité budgétaire qui, sans changement d’orientation fiscale, risque de plonger toute la zone dans la récession.
Au lieu de cela, Libération ce week-end nous fiche le bourdon en comparant les politiques d’austérité prévues par l’UMP, le PS et Lou Ravi (seul le Parti de gauche promet une politique de relance).
On ne parvient même pas à se rassurer d’y entrevoir le maintien d’un certain clivage historique gauche-droite : côté UMP, on continuerait à tailler dans les dépenses publiques et à abaisser les impôts des entreprises, côté PS, on ponctionnerait davantage les ménages aisés et les entreprises.
Des deux côtés, il est question d’un peu plus d’une centaine de milliards à trouver d’ici cinq ans, au moment même où j’apprends par Arrêt sur Images qu’un journaliste de la Croix révèle le mécanisme organisé par la banque suisse UBS qui ferait échapper à l’impôt en France 600 milliards d’euros.
Selon Antoine Peillon, c’est un manque à gagner pour l’Etat français d’un sixième de son budget, soit celui de l’Education.
Alors ? La France aussi va aller négocier avec la Suisse son petit chèque ridicule pour solde de tous comptes immoraux ?
Allez ensuite vous étonner qu’il y ait entre 30 et 40 % des électeurs qui ne sachent pas s’ils vont voter et pour qui !
On dit peu combien l’acceptation institutionnelle de l’évasion fiscale des riches mine moralement nos sociétés. Cette injustice criante, aux relents d'Ancien Régime, pousse chacun à son niveau à ne plus vouloir jouer le jeu du vivre ensemble, à ne plus revendiquer que ses droits et à passer dans le même temps toute son énergie et son ingéniosité à échapper à ses obligations, notamment fiscales et sociales dans une société devenue de défiance généralisée (et pas seulement pour les raisons habituellement évoquées).
« Toi, tu vas finir par voter Méluche ! »
Ce n’est pas l’envie qui m’en manque, mais non, toujours pas. Pas plus le Parti de gauche qu’EELV, car je ne veux pas porter la responsabilité d’avoir fait perdre le candidat de centre-gauche qui pouvait l’emporter sur Sarkozy, et d’avoir ainsi permis la poursuite de la ligne politique de l’UMP pendant encore cinq années.
Oui la campagne des candidats n’est absolument pas à la hauteur des enjeux, dont d’ailleurs une bonne partie échappe au vote français. Comme l’écrit Caroline Fourest dans sa chronique hebdomadaire dans le Monde, cette déception est « parfois invoquée pour ne pas voter. Cette posture est à la fois injuste et naïve. On la trouve, paradoxalement, chez ceux qui idéalisent le vote et la démocratie. Comme s'il s'agissait d'élire le père ou la mère de la Nation idéale, voire un quasi-Dieu.
Mieux vaut se désinscrire tout de suite des listes électorales. Car le "Dieu" politique n'existe pas. Nous ne votons pas pour le candidat parfait, mais pour le moins imparfait. (...) »
Pour nous, le moins imparfait demeure Hollande, même cornaqué par un des éléments le plus droitier du PS, Manuel Valls.
Sa désignation comme directeur de communication de Flamby n’est sans doute pas un hasard : présentable, qui pourrait se trouver dans l’autre camp, pour une France qui ne paraît pas pour cette élection avoir majoritairement le cœur à gauche.
Le scrutin, science démocratique Le Monde 6/4/12
Week-end d'Andrew Haigh
Selon un sondage de l’Ifop, les électeurs de gauche ont une vie sexuelle plus intensive et plus débridée que les électeurs de droite.
On sait enfin ce que DSK a de gauche.
Charlie Hebdo n° 1033
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