Kids at work 1909 par Lewis Hines actuellement à la fondation Cartier-Bresson
« Ce que l’on voit aujourd’hui, c’est le résultat d’un long processus. Ceux qui travaillaient dans des banques, qui avaient un commerce ou de bons postes dans le bâtiment ne se sont pas retrouvés à la rue tout de suite. Ils ont souvent bénéficié d’une aide familiale, ont vécu quelques mois chez des amis ou des proches. Mais le problème est qu’ils ne peuvent pas retrouver de travail, car il n’y en a pas. L’Amérique est confrontée à quelque chose qu’elle ne connaissait pas vraiment, le chômage de longue durée. Quand vous additionnez les saisies immobilières et le chômage, c’est la catastrophe. Alors, peu à peu, on voit tous ces gens qui viennent frapper à notre porte. »
Le directeur d’une structure d’aide aux plus démunis en Floride
Libération du 15 et 16 octobre 2011 Dénuement durable par Fabrice Rousselot
Le chômage reste en tête des préoccupations de français, tout comme le pouvoir d’achat et la protection sociale (retraites et qualité des soins de santé), tandis que l’anxiété concernant « la sécurité des biens et des personnes » passe au second plan.
Pourtant, après 30 ans de chômage de masse et de politiques d’emploi, aucun candidat à l’élection présidentielle ne se risque à faire de la lutte contre le chômage l’axe principal de sa campagne.
La question est certes épineuse. A offres d’emplois données, le chômage dépend d’abord de la population active, qui augmente notamment avec les entrées sur le marché du travail des jeunes, et les sorties du marché du travail des vieux.
On pressent ainsi que le vieillissement d’une population peut réduire les tensions sur le marché du travail : des postes se libèrent en masse pour laisser place à des jeunes. S’appuyant sur ce constat, certains n’avaient pas hésité à nous annoncer la fin prochaine du chômage. De même, on pressent que les dernières réformes des retraites consistant à allonger de la durée d’activité pour faire valoir ses droits à toucher une retraite, a un impact négatif sur le chômage.
Pourquoi ne lie-t-on plus la question du chômage des jeunes à la durée d’activité des vieux ?
Pourquoi également n’explore-t-on pas des incitations à la cessation progressive d’activité assortie d’un tutorat de jeune pour transmettre un métier ?
Alberto Korda par Marcos Lopez
Ensuite reste l’essentiel : la création nette d’emplois permettant d’absorber les demandes nouvelles d’emplois. Création nette, c'est-à-dire la différence entre les créations d’emplois et les destructions d’emplois.
Du côté destructions, pas de problème, on ne connaît guère que la litanie des « plans sociaux », fermetures, délocalisations dans l’industrie, qui en ne cessant de perdre des emplois (13% des emplois en 2008, 600 000 emplois détruits en 10 ans), va finir par rejoindre l’agriculture (3%).
Du côté des services, la fonction publique qui a été au siècle dernier un gros créateur d’emplois, désormais les suppriment en masse. Le commerce et la banque qui un temps affichaient des gisements d’emplois important, tendent aussi à les réduire.
Bref, c’est la création d’emplois qui fait défaut, malgré les « assouplissements » de fonctionnement du marché du travail[1].
Aujourd’hui, le problème s’aggrave du fait du ralentissement de la croissance dont dépend directement celle des créations d’emplois.
Si la lutte contre le chômage est une priorité des candidats à l’élection présidentielle dans l’opposition, ces derniers devront dénoncer avec force les politiques budgétaires restrictives exigées par les marchés, qui vont faire plonger toute l’Europe dans la récession et le chômage.
De bon matin de Jean-Marc Moutout
La fin annoncée de l’emploi industriel est-elle une fatalité ? Quand on considère la richesse générée par ce secteur, le nombre d’emplois tertiaires induits par l’activité industrielle, peut-on se permettre de renoncer au volontarisme politique en la matière ?
Est-ce qu’il est raisonnable de dépenser autant d’argent pour former des ingénieurs qui ne trouveront pas de travail[2] ou qui devront aller travailler en Chine ? Pourquoi en dépenser autant pour former des financiers et des ‘ marketeurs’ ?
Une industrie recentrée uniquement sur la recherche-développement dans les hautes technologies avec délocalisation systématique de la production, cette vieille idée, offre-t-elle un potentiel suffisant de création de richesses et d’emplois ?
Quel combinaison de financements pour solvabiliser l’énorme potentiel d’emplois dans le secteur des soins et d’aides à la personne ?
Où sont les études économiques de reconversion écologique de notre économie (énergies douces, environnement, agriculture biologique), leur impact en matière de qualifications et d’emplois, leurs prescriptions en matière de formation, de soutiens au démarrage... ?
[1] On enregistre en statistique, de plus en plus d’emplois à temps partiel, voire très partiel (8 heures hebdomadaire pour un étudiant), ce qui explique par la même occasion le phénomène des travailleurs pauvres (working poors).
[2] Ce fut un temps le cas d’un de mes frères qui pourtant s’était spécialisé dans ce qui restait un point fort de notre pays : les industries agro-alimentaires. Il a fini par trouver du travail, mais dans un centre de formation du ministère de l'agriculture.
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